Née en Lettonie, Keeana Kee a grandi en Europe de l’Est, avant de partir pour Londres à l’adolescence. Autodidacte, elle y développe son amour de la musique. Celle qui a aujourd’hui élu domicile à New York est mannequin et autrice-compositrice-interprète indépendante. Même si elle aimerait signer un contrat avec un label, elle admet que de faire carrière en tant qu’artiste indépendante, à l’ère des réseaux sociaux, possède ses avantages. Avec plusieurs milliers d’abonné.e.s à son actif, la jeune femme ouvertement lesbienne aux vibes latines se confie.
Parlons de ton dernier single TIKTOK, qui est « dédié aux gens qui hésitent à laisser entrer de grands changements dans leur vie ». Donc tu invites les gens à sortir de leur zone de confort, c’est ça ?
Keeana Kee : C’est l’idée de faire bon usage de son temps, car on aime tous procrastiner et c’est dans la nature humaine ! Bien sûr, je m’adresse également à moi-même dans mes chansons, donc c’est un message pour moi, à la base ! « Ne perds pas ton temps, ne sois pas affecté par les opinions des autres qui valsent autour de toi, car il y a autant d’opinions que de gens, et tous auront une opinion différente sur ton travail. » Étant une artiste gaie, je parle à ma communauté et je suis consciente que les gens ont des croyances et idées différentes à propos de comment on devrait vivre nos vies. Il faut rester vrai envers soi-même et ça, on peut le contrôler, au même titre que notre corps et notre esprit, même notre identité, et personne ne peut doit le faire à votre place, même pas votre famille. Personne n’a le droit de vous dire qui être ou avec qui sortir et c’est le message au cœur de ma chanson. Dans ma chanson, j’encourage la personne avec qui je suis en relation à faire son coming out, car je suis là pour elle.
Tu parles de ta partenaire, est-ce autobiographique ?
Keeana Kee : Ma partenaire est déjà out, donc c’est de la fiction, mais j’ai déjà moi-même été dans cette situation, avant de faire mon coming out, alors c’est ce qui m’a inspirée.
En tant qu’auteure-compositrice-interprète, quel est ton processus créatif ?
Keeana Kee : Quand les idées émergent, j’écris mes chansons au piano ou à la guitare ; j’ai appris moi-même ces instruments et je débute toujours par la mélodie, avant même d’écrire les paroles. Je dois ressentir la musique et la mélodie et c’est ce qui inspire mes paroles et le thème général de mes chansons. Pour moi, tout est une question de feeling. Comme l’anglais n’est pas ma langue maternelle, j’aime prendre mon temps pour écrire les paroles. Cela dit, quand j’ai reçu le beat pour TIKTOK, du producteur russe avec qui je travaille, j’ai tout de suite été inspirée et les paroles me sont venues rapidement pendant que je dansais dans mon appartement.
Est-ce que tu comptes écrire des chansons en letton, ta langue maternelle ?
Keeana Kee : Oui, je parle le letton et le russe. C’est intéressant, car je travaille présentement avec un producteur russe, pour sortir certaines versions en russe des singles déjà sortis en anglais. Par exemple, je viens tout juste de sortir la chanson The Weekend et je compte sortir une nouvelle version.
Est-ce que tu trouves ça plus confrontant de chanter dans ta langue maternelle ?
Keeana Kee : Non, c’est juste que lorsque j’ai commencé à chanter, je vivais déjà à Londres et tout le monde parlait anglais. Maintenant, comme mes fans sont plus anglophones ou latins, j’ai continué en anglais, mais j’ai envie d’agrandir mon cercle dans ma langue maternelle.
Comment en es-tu venue à faire de la musique ?
Keeana Kee : Jeune, j’adorais chanter avec ma grand-mère pour m’amuser. Il n’y a pas de musiciens dans ma famille et j’ai été élevée par une mère monoparentale, donc la musique est venue plus tardivement à moi. Lorsque j’étais à Londres et que je faisais du mannequinat, j’étais capable de payer mon loyer et j’ai commencé à suivre des cours de chant et à investir dans la musique.
En écoutant ton dernier « single » Weekend et en regardant ton clip sur TIK TOK, j’ai ressenti l’ambiance exotique et latine, dans ton style, ta voix et ta danse. Ça m’évoque Shakira. Quelles sont tes influences musicales ?
Keeana Kee : Plusieurs me disent ça pour Shakira, c’est trop cool, et elle fait partie de mes influences, car j’écoutais sa musique, plus jeune. Mes plus grandes idoles sont les Mariah Carey, Whitney Houston, Céline Dion. Je suis obsédée par Céline… c’est une inspiration.
Ce n’est pas facile de faire de la musique, c’est un parcours en soi ; parfois on a le goût de tout laisser tomber, mais dès que je vois performer mes idoles, je me rappelle pourquoi je fais de la musique. J’aime aussi beaucoup Sia et Rihanna.
Dans le clip Coconut Rum and Coke sorti il y a 7 ans, tu n’hésites pas à te mettre aux côtés d’autres femmes, dans des relations lesbiennes sexy. Idem dans You’re Real. Pourquoi était-il important pour toi d’être authentique en lien avec ton orientation sexuelle ?
Keeana Kee : C’est lorsque j’ai fait Coconut Rum que j’ai déménagé en Amérique et que je me suis dit : « Ça y est, c’est ça que je veux faire dans ma vie ». C’était mon choix de me mettre en scène avec des femmes, mais mon équipe à l’époque me suggérait fortement de faire autrement « parce que j’avais l’air hétéro ». On me poussait à tenir le rôle d’une fille straight, car il y a plus de public et que c’est moins niché « de paraître » hétéro. Je ne voulais pas faire ça, car ce n’était pas moi et je ne voulais pas me présenter au monde dans mon premier vidéo de façon non authentique. Ma musique n’attire pas uniquement des gens de la communauté LGBT, mais de tous horizons et je crois que c’est d’abord parce que je suis fidèle à qui je suis. J’ai beaucoup de gratitude pour mes fans qui m’apprécient comme je suis.
Le monde de la musique est connu pour être gay-friendly, mais as-tu déjà ressenti une certaine lesbophobie ?
Keeana Kee : Oui, souvent. Je reçois beaucoup de commentaires me disant que « je joue à être gaie, mais que je ne le suis pas, car je n’ai pas l’air lesbienne et que j’utilise la communauté pour faire carrière ». C’est très blessant, mais je sais qui je suis.
Et dans le monde du mannequinat, ne pas avoir l’air gaie, est-ce une bénédiction ou une malédiction ?
Keeana Kee : Ça dépend où tu évolues dans le monde en tant que mannequin. Aux États-Unis, c’est une bénédiction, car c’est plus ouvert. Tu peux être gaie, avoir l’air androgyne, c’est même encouragé dans l’industrie. Cela dit, certaines agences respectées te modèlent selon un look précis, mais en général ici on nous laisse être qui l’on est.
Parlant d’être qui ont est, les droits LGBT en Lettonie se sont considérablement développés ces dernières années avec des lois récentes. Si l’homosexualité est légale depuis 1992, les personnes LGBT sont encore confrontées à de nombreux défis par rapport aux États-Unis.
Keeana Kee : Je suis si fière, merci à notre président, autant que je sache il est gai, c’est tellement encourageant dans une république postsoviétique, ça tient du miracle. Heureusement, on est dans l’Union européenne, c’est ce qui nous rend libres.
Tu as passé ton enfance en Lettonie et ensuite tu es déménagée à Londres avant de vivre à New York. As-tu vécu un choc culturel ?
Keeana Kee : J’étais straight à l’époque et j’ai déménagé à Londres avec mon copain. Puis, j’y ai découvert mon homosexualité. En Lettonie, je n’aurais même pas osé y penser à l’époque. C’est important de faire des parades et des manifestations, car c’est lorsque tu vois ta communauté que tu réalises que tu es « normale », que c’est correct d’aimer différemment. Puis, lors s’un voyage en France pour mon travail de mannequinat, j’ai rencontré cette fille… Et, tout a changé !
Parlant de changer, quelle est la prochaine étape pour toi musicalement ?
Keeana Kee : Je travaille sur de la musique cinématographique et je vais continuer à sortir des singles. Sans le support d’une maison de disque, sortir un album est très dispendieux et difficile. Je ne veux pas que mes abonné.e.s attendent deux ans pour un album… Comme je sors un single pratiquement tous les mois, mes abonné.e.s me suivent et ont toujours de la nouvelle musique et des vidéoclips à découvrir ! Peut-être qu’un jour je sortirai ma guitare pour une version acoustique de mes chansons… ou de Like The Way I Do de Melissa Etheridge ! Je suis fan d’elle ! Dans un concours en ligne, j’ai gagné une de ses guitares autographiées : je me dis que je pourrais lui rendre hommage avec un cover d’elle avec sa guitare ! Peut-être même qu’un jour je pourrais chanter sur scène avec elle, qui sait ? Tout arrive pour une raison !
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